Gestion du risque et création de valeur

Dr Hassen RAIS

Le risque est par définition un aléa porteur d’opportunités comme de pertes. La gestion du risque est une activité qui, si elle est bien mise en place, peut être créatrice de valeur dans l’entreprise.
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La recherche en sciences de gestion définit le risque comme un aléa ou une volatilité des paramètres du marché, comme les prix des matières ou le taux de change, pouvant engendrer une variation aussi bien négative ou positive, de la valeur de l’entreprise. Par ailleurs, la recherche académique nous apprend plusieurs choses. La première est que le risque n’est pas mauvais en soi, car il peut engendrer une perte comme du gain. La seconde est que ce risque ou cette volatilité peut créer de la valeur quand elle est bien gérée. En fait, l’incertitude crée souvent des opportunités, pour ceux qui savent l’exploiter, ainsi le risque management créer de la valeur principalement par trois canaux :

 

Premièrement, il permet aux entreprises de prendre de meilleures décisions. En intégrant le risque dans leurs projets et leur valorisation, les entreprises peuvent sélectionner et structurer les meilleurs investissements. Et en ajustant la performance en fonction du risque, on met en évidence la véritable valeur créée par différents projets.

 

Deuxièmement, la gestion des risques minimise le coût de la flexibilité financière requise par les entreprises pour atteindre leurs objectifs de croissance, même face à des conditions commerciales défavorables. La flexibilité financière peut augmenter de 10 à 15% la valeur créée par une entreprise (Voir Froot, Stein, et Sharfstein ; 1993 et Dixit and Pindyck ; 1994). Si la valeur de la flexibilité financière est bien établie dans la littérature académique, elle doit être effectivement traduite dans les pratiques commerciales.

 

Enfin, la gestion des risques permet aux entreprises de tirer parti de la flexibilité opérationnelle (tarification basée sur le risque, arbitrage multi-commodités) et de la flexibilité stratégique (par exemple, le droit d’augmenter la capacité sur un site de production ou le droit de produire une suite à un film). Cette notion a été développée dans la littérature académique, mais reste à ce jour timidement mise en application.

 

Étant donné que ces leviers sont additifs, la mise en œuvre d’un programme de gestion des risques cohérent et globale peut augmenter la valeur créée par les entreprises de 20 à 30% (Voir Allayanis et Weston ; 2001 et April ; 2006). Si la plupart des programmes de gestion des risques se donnent comme objectif la maximisation de la valeur de l’entreprise, peu expliquent comment la réaliser. De même, très peu de cadres supérieurs, même les risk managers, expriment clairement comment l’organisation et les processus de gestion des risques contribuent à la création de valeur. Par ailleurs, le profil recherché et recruté aujourd’hui par les entreprises est celui d’un contrôleur, dont la compétence consiste à appliquer les règles et les recommandations pour minimiser ou éviter les risques. Ces mêmes entreprises gagneraient davantage en investissant sur des profils de manager dont la compétence serait de savoir saisir les opportunités des aléas et tirer profit de la volatilité.

 

Enfin, il est aujourd’hui de la responsabilité de l’ensemble des risk managers de faire ce travail de communication et d’explication de leur métier et des avantages qu’ils peuvent apporter. Il est également de la responsabilité des formations en management des risques de donner davantage de compétences et de moyens aux futurs diplômés dans l’exercice de leur activité. On comprend ainsi que le risk management est une fonction fondamentale dans la création de valeur pour l’entreprise et pour l’économie dans son ensemble.

 

Dr RAÏS Hassen
ESSCA, School of Management.

 

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